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Reforme Des Retraites

La réforme des retraites en 22 questions

Le premier ministre, Edouard Philippe, a détaillé mercredi 11 décembre les contours de sa réforme qui doit créer un régime universel de retraites. Après des mois de rapports et de débats, sait-on enfin ce que contient cette réforme ? Qui concernera-t-elle ? Que changera-t-elle vraiment par rapport au système actuel ?

Voici des réponses à de nombreuses questions sur le système actuel et celui présenté dans la réforme des retraite

Qu’est-ce que l’âge pivot ?

L’idée du rapport Delevoye est de maintenir le droit de partir en retraite à 62 ans (l’âge légal), mais d’ajouter une nouvelle référence : l’« âge pivot » ou « âge d’équilibre ».

En cas de départ en retraite en dessous de cette limite, les pensions de retraite seraient minorées. A l’inverse, les retraités qui partieraient après toucheraient davantage. Les conditions de ces bonus-malus seront fixées par la nouvelle gouvernance du régime universel qui doit être mise en place d’ici 2021. Il incitera donc les travailleurs à différer leur départ à la retraite, sans les y obliger formellement.

Ce nouvel âge pivot sera fixé à 62 ans et quatre mois en 2022 et reculera pour atteindre 64 ans à partir de 2027 – il pourra par ailleurs continuer d’évoluer par la suite. C’est également cette âge qui serait retenu pour le versement du minimum retraite à 1 000 euros par mois.

Qu’est-il prévu pour les parents ?

Aujourd’hui, il existe une majoration des pensions de 10 % pour les familles avec trois enfants et plus, accordée aux deux parents. Les mères bénéficient aussi de huit trimestres de cotisation supplémentaires par enfant.

Dans le système universel, un bonus de 5 % des points de retraite sera accordé pour chaque enfant dans le foyer, dès le premier enfant. Il sera attribué par défaut aux mères, mais pourra être partagé en deux ou donné à l’autre parent. Un autre bonus de 2 % de pension pour les familles nombreuses (3 enfants et plus) est aussi prévu.

Par ailleurs, les congés maternité donneront des points en plus dès le premier jour d’arrêt, à hauteur du revenu de l’année précédente et les congés parentaux à temps partiel ou à temps plein donneront des points à hauteur de 60 % du smic pendant les 3 premières années de l’enfant (6 ans à partir du troisième). Ces points serviront à majorer les pensions de retraites.

Qu’est-ce qu’un point de retraite ?

Le gouvernement défend une formule où les cotisations de retraite des travailleurs sont converties en points de retraite suivant la même formule pour tous. Le rapport Delevoye propose d’accorder un point pour 10 euros cotisés. Des points « bonus » peuvent également être accordés dans certaines situations (chômage, congé maternité, accompagnement d’un proche,etc.).

Ainsi, un travailleur accumule des points tout au long de sa carrière dans une sorte de cagnotte fictive, et c’est sur la base de celle-ci qu’est calculée sa pension de retraite lorsqu’il cesse de travailler.

Quand la réforme sera-t-elle votée ?

Après son élection, Emmanuel Macron entendait lancer sa réforme des retraites à la fin 2018 ou au début 2019. Les difficultés accumulées depuis, et en particulier le mouvement de contestation des « gilets jaunes », l’ont amené à repousser ce calendrier à plusieurs reprises.

Après une deuxième phase de concertation, Edouard Philippe a annoncé que le texte serait discuté au Parlement à la fin du mois de février 2020, après avoir été présenté en conseil des ministres le 22 janvier.

La réforme peut-elle encore évoluer ?

Jean-Paul Delevoye avait rendu un rapport détaillé en juillet 2019, qui dessinait les contours de la réforme. Edouard Philippe a ensuite clarifié les contours de la réforme qui doit faire l’objet d’un projet de loi présenté au Parlement en 2020.

Les grandes lignes de ce projet sont désormais connues, mais il est encore susceptible d’être amendé en fonction des discussions à l’Assemblée nationale et au Sénat ainsi que du contexte social.

Emmanuel Macron a lui même qualifié son projet de réforme de « proposition » jeudi 12 décembre, ajoutant : « Maintenant, il y a une concertation qui doit se faire ».

Qu’est-ce qu’un régime « universel » ?

Il existe actuellement 42 caisses de retraite, qui ont chacune leurs spécificités et sont administrées indépendamment. Résultat: les retraités qui ont cotisé à plusieurs régimes perçoivent plusieurs pensions différentes, versées par des organismes différents, avec des interlocuteurs différents.

Créer un système universel vise donc d’abord à simplifier cette situation, mais ce n’est qu’une partie de la réforme envisagée par Emmanuel Macron. Elle vise également à gommer les particularités des anciens régimes pour que les mêmes règles s’appliquent à tous.

La pénibilité sera-t-elle prise en compte ?

Le gouvernement était très attendu sur la question. « Nous allons améliorer la prise en compte de la pénibilité, avec la possibilité pour ceux qui exercent des métiers usants de partir deux ans plus tôt que les autres », a promis Edouard Philippe le 11 décembre. Le compte professionnel de pénibilité (C2P) sera étendu aux fonctionnaires. « Cela bénéficiera directement aux infirmiers de la catégorie A qui travaillent de nuit et n’ont aucun droit aujourd’hui. »

Il a ajouté vouloir donner plus de points pour ceux qui exercent longtemps des métiers pénibles, et permettre aux personnes exposées à un critère de pénibilité de bénéficier en fin de carrière de trois années à mi-temps payées en temps plein. La CFDT n’a pas été convaincue : « Il y a beaucoup d’insuffisance sur la pénibilité. »

Est-ce la fin de la retraite par répartition ?

Le système universel tel qu’il est envisagé aujourd’hui reste un système par répartition. En effet, il est toujours prévu que les pensions de retraite en France soient financées par les cotisations des actifs.

Il n’a jamais été question d’adopter un système par capitalisation, où c’est l’épargne constituée par le travailleur lui-même qui finance plus tard sa propre retraite.

Qu’est-il prévu pour les carrières « à trous » ?

Dans le système actuel, il faut être rémunéré pour l’équivalent d’au moins 150 heures au salaire minimum sur l’année pour valider un trimestre (et au moins 300 heures pour valider deux trimestres, 450 heures pour en valider trois et 600 heures pour une année complète).

Bon nombre de contrats courts ou de « petits boulots » ne donnent donc aucun droit à la retraite ou peu aujourd’hui, même lorsque des cotisations ont été versées. La réforme portée par le gouvernement prévoit à l’inverse de tenir compte de toutes les périodes d’activité déclarées, mêmes les plus courtes.

Si l’on prend l’exemple d’un étudiant qui travaillerait 100 heures au smic dans l’année, il ne gagnerait aucun droit à la retraite aujourd’hui. Avec la réforme, il accumulerait 25 points de retraite environ (ce qui est cependant assez peu : cela correspond à 14 euros de retraite annuelle, selon les règles proposées dans le rapport Delevoye).

Les pensions de réversion vont-elles disparaître ?

Le gouvernement s’est engagé à ne pas toucher aux pensions de réversion versées actuellement. La réforme prévoit en revanche une refonte du système de réversion, en garantissant au conjoint survivant 70 % de la somme des deux retraites du couple (là où divers taux existent aujourd’hui). Ce droit ne s’appliquerait qu’aux couples mariés.

Comment les points seront-ils convertis en pension ?

Dans ce système universel, un travailleur accumule des points de retraite pendant sa carrière. Le rapport Delevoye propose ensuite de les convertir suivant une règle de calcul unique qui serait de 5,50 euros de pension par an pour 10 points aux débuts de la réforme.

Par exemple, un salarié qui aurait travaillé quarante-trois ans avec un salaire moyen de 1,5 smic (1 813 euros net par mois) totaliserait 29 800 points et pourrait toucher environ 1 265 euros net de retraite par mois en partant à la retraite à 64 ans, selon les simulations du gouvernement. Cette somme varierait en fonction d’autres facteurs comme l’âge de départ en retraite, le nombre d’enfants et d’autres cas particuliers. De même, l’âge pivot et la valeur du point évolueront dans le temps.

Les retraites complémentaires vont-elles disparaître ?

Selon les préconisations de Jean-Paul Delevoye, les régimes complémentaires obligatoires font partie des 42 régimes amenés à être regroupés dans le régime universel, y compris le système Agirc-Arrco, qui concerne 30 millions de travailleurs du secteur privé.

Age pivot ou durée de cotisation, quelle différence ?

Mettre en place un âge pivot, ou âge d’équilibre, revient à fixer une borne d’âge qui est la même pour tous. En partant plus tôt, le calcul de la pension de retraite est moins favorable. Au-delà, il est bonifié.

Mais Emmanuel Macron a publiquement évoqué durant l’été l’hypothèse d’écarter cet âge d’équilibre pour ajouter plutôt une contrainte de durée de cotisations. Cela reviendrait à conserver le principe actuel : il faut cotiser 172 trimestres soit 43 annuités (pour les salariés nés à partir de 1973) afin de bénéficier d’une pension de retraite complète.

Le gouvernement a finalement tranché : le futur système reposera bien sur un âge pivot, et pas sur une durée de cotisations minimum.

Comment fonctionnera le bonus-malus lié à l’âge pivot ?

L’âge pivot de départ en retraite, qui doit être de 64 ans en 2027, sera associé à un système de bonus-malus sur la valeur du point de retraite.

– Ceux qui partent en retraite à l’âge pivot toucheront une pension calculée sur la valeur normale du point de retraite ;

– pour ceux qui partent avant l’âge pivot, le point aura une valeur diminuée de X % par année d’écart (le rapport Delevoye proposait que ce soit 5 %, mais ce point est ouvert aux négociations) ;

– pour ceux qui partent en retraite après, le point aura une valeur bonifiée des mêmes X % par année d’écart.

En cas de départ en retraite avant l’âge pivot, le malus s’applique pour toute la durée de la retraite, et pas seulement jusqu’à ce que l’âge pivot soit atteint.

A quel âge peut-on prendre sa retraite avec ce système ?

Reste cependant à savoir avec quel montant de pension. Le nouveau mode de calcul sera largement favorable à ceux qui travailleront au-delà de l’âge légal avec la mise en place d’un âge d’équilibre, qui pourrait être de 62 ans et quatre mois en 2022 puis 64 ans en 2027. En dessous de cet âge, les pensions sont frappées d’un malus. Au-dessus, elles sont bonifiées. Cette règle vise à traduire l’objectif fixé par le premier ministre : « Sans forcer, il faut inciter les Français à travailler plus longtemps ».

De plus, la retraite minimum envisagée de 1 000 euros par mois à partir ne sera garantie qu’à ceux qui partiront en retraite à l’âge d’équilibre ou après.

Comment le service militaire sera-t-il pris en compte ?

Le service militaire est resté obligatoire jusqu’en 1997 et la conscription a pris fin en 2002. Des millions de Français nés en 1975 et après, qui entreront à partir de 2025 dans le système de retraite universel, ont donc effectué un service militaire et peuvent se poser la question de la manière dont il sera pris en compte dans le calcul de leur retraite.

La réponse est en principe simple : « Toute la partie de carrière effectuée jusqu‘à 2025 donnera lieu à une retraite calculée sur les anciennes règles », a annoncé Edouard Philippe. Le service militaire sera donc pris en compte suivant les règles de l’ancien système pour la fraction de retraite correspondant aux années travaillées avant 2025.

Quand la réforme entrera-t-elle en vigueur et pour qui ?

Le rapport Delevoye proposait que la réforme s’enclenche à partir de 2025 et concerne les actifs nés en 1963 et après.

Mais ce calendrier a été revu : finalement, les générations nées avant 1975 ne seront pas concernées, tout comme les retraités actuels. Ceux qui partiront en retraite entre 2022 et 2037 seront en revanche concernés par la mise en place d’un âge pivot, qui serait de 62 ans au départ et atteindrait 64 ans à partir de 2027.

La réforme commencerait à s’appliquer en 2037 pour les actifs nés à partir de 1975 qui prendront leur retraite à 62 ans. L’année 2037 sera également retenue pour faire basculer les régimes spéciaux dans le nouveau système. Cela veut dire, par exemple, que les bénéficiaires de ces régimes qui sont nés avant 1980 (pour les départs en retraite à 57 ans) ou avant 1985 (pour les départs à 52 ans) ne seront pas touchés par la réforme.

Enfin, la génération née en 2004 sera la première à être uniquement intégrée au futur régime universel, pour les années travaillées dès 2022.

Qu’est-il prévu pour ceux qui ont travaillé à l’étranger ?

La question des expatriés n’est pas abordée dans le rapport Delevoye. Elle fait donc partie des sujets qui restent à préciser dans les semaines et mois qui viennent.

Dans le système actuel, les périodes de travail à l’étranger peuvent être reconnues lorsqu’il existe une convention de sécurité sociale entre la France et le pays où l’expatrié a travaillé. Il existe également la possibilité de cotiser volontairement au système français pour cumuler des droits à la retraite pendant les années passées à l’étranger.

Comment les enfants nés avant 2025 seront-ils pris en compte ?

La transition vers le futur régime universel commencera en 2025. Ceux qui sont nés entre 1975 et 2004 toucheront, au moment de la retraite, une pension qui sera en partie calculée suivant l’ancien système (pour les années travaillées avant 2025) et en partie suivant les nouvelles règles (pour les années à partir de 2025).

Les enfants nés avant 2025 donneront des droits supplémentaires à leurs parents de deux manières, selon le gouvernement. 1) Ils donneront droit aux avantages prévus dans l’ancien système pour la première partie de carrière (avant 2025). 2) Ils donneront droit aux avantages prévus dans le régime universel pour la deuxième partie de carrière (à partir de 2025).

Quand l’âge pivot sera-t-il introduit et qui concernera-t-il ?

La réforme ne commencera à s’appliquer qu’en 2037, pour celles et ceux nés en 1975. Les actifs nés avant, ceux qui ont moins de 50 ans à la fin de 2024, ne seront donc pas concernés pas le système universel.

Mais l’âge pivot, en revanche, commencera à s’appliquer bien avant cela. Le gouvernement prévoit en effet de l’introduire dès 2022, en le fixant au départ à 62 ans et quatre mois. Ce seuil pourrait ensuite être relevé de quatre mois par an, pour atteindre 64 ans en 2027 (un calendrier qui pourra être aménagé par la future gouvernance du régime universel). En parallèle, l’âge légal du taux plein sera progressivement abaissé, puis supprimé.

En résumé, l’âge pivot s’appliquera à l’ensemble des actifs nés à partir de 1960. Il y aura en revanche des exceptions, notamment les carrières longues, qui continueront de donner droit à un départ deux ans plus tôt.

Comment la transition entre les deux systèmes se passera-t-elle ?

Le régime universel concernera celles et ceux qui sont nés en 1975 et après et qui partiront en retraite à partir de 2037. Les personnes nées avant 1975 ne seront pas rattachées au système universel.

Si les Français nés en 2004, qui ont 15 ans aujourd’hui, toucheront une retraite entièrement calculée sur un sytème à points, la situation est plus compliquée pour ceux qui sont nés entre 1975 et 2004. Selon le premier ministre, leur pension sera découpée en deux morceaux, qui correspondront à deux parties distinctes de leur carrière :

– les années travaillées avant 2025 donneront droit à une pension de retraite calculée suivant les règles des régimes actuels ;

– les années travaillées à partir de 2025 donneront droit à une pension de retraite calculée à partir des règles du régime universel. Ce qu’on peut retenir, c’est que plus l’année de naissance d’un actif est proche de 2004, plus il sera concerné, en proportion, par la réforme. Pour la première génération concernée, celle qui est née en 1975 et qui partira en 2037, la part calculée avec les nouvelles règles « représentera moins d’un tiers de la pension totale », selon Edouard Philippe.

Comment la valeur du point sera-t-elle fixée ? Pourra-t-elle baisser ?

Le gouvernement s’est engagé à plusieurs reprises à ce que la valeur du point de retraite ne puisse pas baisser dans le futur régime universel . « La loi donnera des garanties incontestables sur la valeur du point pour garantir le niveau des retraites », a assuré Edouard Philippe.

La manière dont la valeur du point évoluera année après année reste cependant à détailler, mais le premier ministre en a donné les grandes lignes. Selon lui, elle sera fixée par les partenaires sociaux, avec la validation du Parlement. Par ailleurs, elle sera progressivement indexée « sur les salaires, qui augmentent plus vite que l’inflation ».

En résumé, on ne peut pas dire qu’il sera possible de baisser d’un coup la valeur des pensions des futurs retraités dans le nouveau système. La question de la revalorisation des pensions sur la durée, et donc du futur pouvoir d’achat des retraités, n’est en revanche pas complètement tranchée

Source : Le Monde, 12 décembre 2019

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